
Apéro Géopolitique: L'Asie centrale - le « cœur » du nouveau monde ?
Apéro Géopolitique à Genève N.8: L'UE - Renouveau ou effondrement ?
Apéro Géopolitique à Genève N.7 : « Quel est l'avenir de la Syrie ? ».
Apéro Géopolitique à Genève N.6 : « La Chine, puissance hégémonique ou nouvel artisan de la paix ?
Élection présidentielle américaine de 2024 : Que se passera-t-il ensuite ?
Apéro géopolitique №4 : « Afrique : le grand réveil ?
Apéro Géopolitique #3 : Les BRICS veulent-ils réinventer le monde ?
Apéro Géopolitique #2 : Iran, Israël et Arabie Saoudite : le nouveau grand jeu au Moyen-Orient
Apéro Géopolitique #1 : Guerre en Ukraine, pourparlers de paix et scénarios possibles
L’Asie centrale – le « cœur » du nouveau monde ?
Apéro Géopolitique : « Quel est l’avenir de la Syrie ?
Apéro Géopolitique : « La Chine, puissance hégémonique ou nouvel artisan de la paix ?
Les BRICS veulent-ils réinventer le monde ?
Iran, Israël et Arabie Saoudite : le nouveau grand jeu au Moyen-Orient – Apéro Géopolitique
Les pourparlers de paix et les scénarios possibles de la guerre en Ukraine
L’Asie centrale – le « cœur » du nouveau monde ?
Apéro Géopolitique : « Quel est l’avenir de la Syrie ?
Apéro Géopolitique : « La Chine, puissance hégémonique ou nouvel artisan de la paix ?
Les BRICS veulent-ils réinventer le monde ?
Iran, Israël et Arabie Saoudite : le nouveau grand jeu au Moyen-Orient – Apéro Géopolitique
Apéro Géopolitique : « La Chine, puissance hégémonique ou nouvel artisan de la paix ?
Iran, Israël et Arabie Saoudite : le nouveau grand jeu au Moyen-Orient – Apéro Géopolitique
Les pourparlers de paix et les scénarios possibles de la guerre en Ukraine
Migration et mondialisation – Quelques vérités fondamentales
In the unipolar moment that followed the collapse of the Soviet Union, capitalist neoliberalism, not really a new phenomenon, swept across the planet, creating conditions for the now seriously compromised phenomenon called globalization – the end of history, some thought.Dans le moment unipolaire qui a suivi l’effondrement de l’Union soviétique, le capitalisme néolibéral – phénomène pas vraiment nouveau – s’est répandu à travers la planète, créant les conditions d’une mondialisation aujourd’hui sérieusement remise en question. Certains y voyaient alors la « fin de l’histoire ».
La migration, réalité aussi ancienne que l’humanité elle-même, s’est retrouvée au cœur du démantèlement généralisé des frontières. Elle fut perçue, tant par ses partisans que par ses détracteurs, comme un élément clé de la mondialisation – au même titre que la libre circulation des biens et des capitaux, la révolution de l’information, la remise en cause de l’État-nation et l’universalisation d’une philosophie politique fondée sur les droits. Le multiculturalisme est devenu une réalité, voire un objectif, dans certains pays riches.
Divers aspects de la mondialisation ont fini par susciter une forte réaction, tant au sein des sociétés traditionnelles que parmi les populations des pays riches touchées par la désindustrialisation, les changements culturels rapides et un sentiment croissant d’insécurité. La migration, en particulier, a fini par être perçue par beaucoup plus comme une menace que comme une opportunité, devenant une question politique brûlante. Pour la migration comme pour d’autres dimensions de la mondialisation, l’histoire avait brutalement repris son cours.
Jetons un coup d’œil à certaines grandes problématiques migratoires en 2025 et aux années qui nous y ont conduits :
● Tout au long de l’ère post-guerre froide, la plupart des gouvernements ont échoué à gérer les migrations. L’Asie a fait figure d’exception notable. Du Japon à l’Arabie saoudite, en passant par la Chine, des systèmes strictement appliqués étaient la norme. La plupart des pays occidentaux, notamment ceux au passé colonial, ont adopté une approche de laisser-faire. Certains avaient des lois théoriquement strictes mais les appliquaient mollement, tout en laissant entrer massivement des migrants illégaux.
● L’économie de la migration favorisait le flux des pays pauvres vers les pays riches, qui restaient l’aimant principal de la migration moderne. Les employeurs soutenaient souvent cette dynamique, qui permettait de maintenir les salaires à la baisse. Les migrants occupaient les emplois peu rémunérés que les citoyens des pays riches ne voulaient plus faire.
● Une confusion généralisée entre migrants économiques et réfugiés a conduit à la corruption ou à l’effondrement des systèmes d’asile dans la plupart des pays occidentaux. À gauche de l’échiquier politique, il est devenu courant de considérer la migration comme un droit, les frontières ouvertes comme la norme, et chaque migrant comme un réfugié.
● L’assimilation des nouveaux arrivants s’est révélée plus difficile que prévu par les gouvernements, aboutissant à la multiplication de sociétés dans la société. Ce phénomène a été particulièrement marqué chez les migrants de race ou de religion différentes de la population établie. Le multiculturalisme a été la tentative de donner un visage acceptable au problème.
● Les opposants à la migration affirmaient que celle-ci augmentait la criminalité et l’insécurité – et les statistiques pénitentiaires ainsi que le sentiment populaire soutenaient souvent ce point de vue. Dans certains pays, un système judiciaire à deux vitesses a vu le jour pour masquer le problème. Le trafic de migrants est devenu une industrie majeure.
● Une réaction nationaliste s’est produite dans les pays développés contre de nombreux éléments de la mondialisation. La migration est devenue un enjeu central lors des élections dans la plupart des démocraties. Populistes et élites se sont servis de la question migratoire comme d’un marqueur dans leurs débats politiques de plus en plus polarisés.
Le tableau n’est guère reluisant. Et pourtant, la migration reste un élément essentiel dans de nombreuses économies, et les pressions migratoires ne disparaîtront pas. Quelles perspectives pour les décennies à venir ?
● Les gouvernements soumis à de fortes pressions migratoires chercheront à fermer leurs frontières et à limiter les entrées illégales, obligeant les migrants à passer par des systèmes d’entrée autorisés.
● La migration sélective se poursuivra, notamment dans les professions hautement qualifiées.
● Les systèmes d’asile seront révisés pour enrayer les abus généralisés.
● Les pays de transit se verront proposer des accords financiers pour freiner les flux migratoires.
● Les pays en développement risquent de voir diminuer les recettes issues des transferts de fonds, avec le déclin des premières générations de migrants. (Les envois de fonds représentent une source majeure de devises pour ces pays.)
● La migration circulaire pourrait redevenir à la mode : un système dans lequel les migrants sont admis pour une durée de travail déterminée, puis tenus de rentrer dans leur pays d’origine.
● Les pays développés refuseront probablement de reconnaître les « réfugiés climatiques » et insisteront sur des stratégies d’adaptation.Il reste à se demander si le déclin de la mondialisation pourrait rendre possible la création d’un système international de gestion des migrations, tel que certains le souhaitent depuis que la migration est devenue un facteur majeur des relations internationales sur les plans politique, économique et social. L’idée semble peu probable, étant donné les secousses que traverse déjà le monde, mais voici quelques éléments que pourrait inclure un tel système :
● Reconnaissance par chaque nation de sa responsabilité à gérer les migrations dans l’intérêt de son propre peuple et du bien collectif des nations.
● Acceptation du retour de ses citoyens non accueillis dans un autre pays.
● Mesures fortes pour mettre fin au trafic et au passage illégal de migrants.
● Publication, pays par pays, des conditions d’accueil des migrants.
● Création d’un registre international de l’emploi en ligne, éventuellement géré par l’OIM.
● Engagement à faire correspondre l’asile aux définitions de la Convention sur les réfugiés, aujourd’hui largement ignorées, ou à négocier une nouvelle convention. (Cette seconde option serait extrêmement complexe.)
● Dispositions spéciales pour les personnes déplacées par la guerre ou des catastrophes naturelles, qui ne sont pas couvertes par la convention actuelle.Brunson McKinley, Saint-Nicolas-de-Véroce, le 12 avril 2025
Le renversement soudain en Syrie : un coup monté ou un tournant géopolitique ?
Comment une prise de pouvoir rapide et sans effusion de sang a redessiné le Moyen-Orient et quelles en sont les répercussions régionales.Le 8 décembre 2024, la situation en Syrie s’est retournée en l’espace de quelques jours sans coup férir. Presque aucun coup de feu n’a été tiré. Une ribambelle de groupuscules jihadistes (entre 20 et 30 groupes) principalement d’obédience Frères Musulmans, alliés à des survivants de Al Qaeda et de Daech (EI), soutenus par la Turquie d’un côté et Israël de l’autre avec probablement un financement qatariote et un parrain (manipulateur ?) lointain, les USA. La Syrie est revenue aux mains de sunnites après un demi-siècle de dictature alaouite (d’obédience chiite).
Le régime de Bachar El Assad n’a offert aucune résistance. Ni l’armée, ni les services de renseignements, ni le très brutal et tristement célèbre frère de Bachar, Maher, avec ses troupes spéciales n’ont agi ou réagi. Les alliés du régime déchu, la Russie, l’Iran, l’axe de la Résistance (Hezbollah (HA) ou le Haschd ech Chaabi irakien) n’ont pas non plus réagi, ni aidé à part quelques belles paroles.
Cela ressemble étrangement à une pièce de théâtre préparée à l’avance, avec un producteur/metteur en scène, deux acteurs principaux et quelques accessoiristes ayant tous participé à la mise en scène de cette tragi-comédie. Cela a été trop vite pour que l’on ne puisse pas imaginer un « coup monté », qui paraît s’être déroulé comme un conte de fées. D’ailleurs toutes les informations qui ont circulé indiquent que cette bataille se prépare depuis plusieurs mois. Il fallait attendre le feu vert pour appuyer sur le bouton.
Il est venu dès qu’un « cessez-le-feu » a été signé au Liban. Le rideau s’est levé sur la scène, dès le lendemain de la signature de cet accord (pour employer un terme plus exact, un « mandat » américano-français) par HA au Liban. Après le génocide des Palestiniens, autorisé, encouragé et financé par le monde occidental, l’affaiblissement considérable de l’Axe de la Résistance et de l’Iran lui-même.
Peu importe comment la Syrie s’est renversée, ce sont les conséquences de cette action qui sont importantes. C’est un énorme pas en avant que la Pax Americana a franchi avec ce coup de force, un de plus dans l’avancée américaine, c’est-à-dire, la mise en place dans nos régions troubles de ce « Nouveau Moyen-Orient », dont ils rêvent depuis plusieurs décennies. Mais, c’est aussi un grand risque que prennent les Américains avec cette « victoire » facile.
Les acteurs sont nombreux avec des agendas non seulement différents, mais parfois contradictoires. La Turquie et Israël n’ont pas les mêmes objectifs. Les Kurdes et les Jihadistes encore moins. Les Jihadistes entre eux non plus. Certes, les ennemis des USA sont affaiblis, mais sont loin d’avoir disparu de la carte. Ni l’Iran, ni HA, ni la Russie, ni l’Axe de la Résistance n’ont disparu. La Chine est restée prudente durant toute cette période. Même les Alliés, comme l’Arabie Saoudite est restée silencieuse. Israël a son propre agenda (le Grand Israël, « du Nil à l’Euphrate ») qui ne correspond pas nécessairement à celui des américains à moyen ou long terme.
Les répercussions sur les pays voisins et lointains sont encore totalement inconnues et peuvent être aussi très grandes. Je résume très succinctement (une liste à la Prévert) les conséquences potentielles de ce changement de statut en Syrie :
- En Syrie même. La transition risque de ne pas se passer aussi pacifiquement que cela en a l’air jusqu’à maintenant. Les divergences entre les factions jihadistes, les velléités d’autonomie des kurdes, les réminiscences de l’ancien régime, les occupations turque et israélienne sont tous des facteurs de déstabilisation potentielle ;
- L’Irak craint que cette vague jihadiste ne se répercute chez eux. Les factions irakiennes de l’axe de la résistance craignent des frappes israéliennes, soutenues par des composantes locales anti-iraniennes. De même l’Irak pourrait craindre une résurgence de l’EI ;
- HA craint lui aussi d’être combattu autant de l’intérieur, à travers les réfugiés syriens au Liban, ou par un renforcement de l’opposition politique libanaise ou par des bombardements israéliens qui occupent (de manière illégale) le Mont Hermon qui surplombe le Liban ;
- Le Liban craint évidemment que si le scénario précédent a lieu, dans le but de porter le coup de « grâce » à HA, que cela ne provoque non seulement des soucis sécuritaires incontrôlables, mais un semblant de mini guerres civiles. Sans oublier que le jihadistes ont pris le contrôle (côté syrien, évidemment) de tous les postes frontières avec le pays, qui souffre déjà de problèmes politiques, économiques, financiers énormes. En plus les Israéliens qui occupent encore une partie du territoire libanais ne semblent pas vouloir quitter à la fin des 60 jours prévus depuis l’instauration du nouveau mandat ;
- L’Iran craint encore une frappe israélienne potentielle sur son infrastructure nucléaire ou autre. De même des troubles intérieurs, avec un changement potentiel de régime ;
- La Jordanie craint également autant la contagion du Jihadisme chez eux, que de l’annexion de la Cisjordanie par Netanyahou, dès la prise de pouvoir de Trump et le renvoi de milliers de Palestiniens vers la Jordanie ;
- La Turquie, acteur essentiel et principal de ce renversement de régime, craint des conflits d’abord avec les Kurdes, ensuite des tensions avec Israël, qui, depuis le Mont Hermon, peut observer tout mouvement suspect au moins jusqu’au Sud de la Turquie, mais aussi avec l’OTAN et les USA ;
- Israël même, qui a complètement détruit l’infrastructure militaire syrienne, et occupé de nouvelles terres en Syrie où il compte rester au moins jusqu’à fin 2025 peut s’attendre à un nouveau front (peut-être que même il le souhaite ?) ;
- Les pays du Golfe qui voient d’un mauvais œil l’apparition de Frères Musulmans, leur bête noire, au pouvoir à Damas, avec le soutien de tout le monde occidental, USA en tête, leur principal allié. Comment feront-ils pour « financer » la reconstruction de la Syrie et que feront-ils des ex-Qaeda et ex-Daech libérés ?
- La Russie craint d’être chassée de ses 2 bases militaires syriennes (Humaymim et Tartous). Elle vient d’annoncer que la GB et les USA viennent d’armer l’EI pour mener des opérations « terroristes » contre ces deux bases ;
- L’Europe qui craint de voir revenir chez eux des prisonniers politiques (de nationalités européennes) qu’ils avaient qualifié de terroristes (anciens Al Qaeda, EI, Frères Musulmans, etc.). Si de nouveaux troubles importants venaient à s’installer de nouveau en Syrie, une nouvelle vague de réfugiés pourrait se rajouter aux précédentes et leur statut sera encore indécis, alors que l’Europe est en train justement de considérer ne plus vouloir accorder la protection aux anciens réfugiés vu leur reconnaissance du nouveau pouvoir ;
Ce ne sont que certains des problèmes potentiels, peut-être les principaux, qui semblent découler de la situation en Syrie. Il est cependant beaucoup trop tôt pour envisager quoi que ce soit comme analyse sérieuse de ce qui vient de se passer en Syrie et de ses conséquences ces dernières semaines. Je ne m’aventurerai donc pas sur ce terrain encore largement miné par des spéculations de tout genre. Il se pourrait aussi que tout se passe bien, comme cela a l’air de se passer jusqu’à maintenant, comme par magie.
Malek El-Khoury
Beyrouth / Genève le 29.12.24
NB: je signale que la présente analyse (comme toutes les précédentes ou les suivantes) ne concerne qu’un seul et unique aspect de la complexité de la politique moyen-orientale ou mondiale. Il ne faut donc pas la considérer comme complète et exhaustive. La situation est beaucoup plus nuancée que cela.
Je précise également que ceci est ma propre opinion dont j’assume seul la totale responsabilité.
Syrie
Retour des sunnites en Syrie : triomphe éphéméride ou prélude à un chaos régional ?Le 8 décembre 2024, la situation en Syrie s’est retournée en l’espace de quelques jours sans coup férir. Presque aucun coup de feu n’a été tiré. Une ribambelle de groupuscules jihadistes (entre 20 et 30 groupes) principalement d’obédience Frères Musulmans, alliés à des survivants de Al Qaeda et de Daech (EI), soutenus par la Turquie d’un côté et Israël de l’autre avec probablement un financement qatariote et un parrain (manipulateur ?) lointain, les USA. La Syrie est revenue aux mains de sunnites après un demi-siècle de dictature alaouite (d’obédience chiite).
Le régime de Bachar El Assad n’a offert aucune résistance. Ni l’armée, ni les services de renseignements, ni le très brutal et tristement célèbre frère de Bachar, Maher, avec ses troupes spéciales n’ont agi ou réagi. Les alliés du régime déchu, la Russie, l’Iran, l’axe de la Résistance (Hezbollah (HA) ou le Haschd ech Chaabi irakien) n’ont pas non plus réagi, ni aidé à part quelques belles paroles.
Cela ressemble étrangement à une pièce de théâtre préparée à l’avance, avec un producteur/metteur en scène, deux acteurs principaux et quelques accessoiristes ayant tous participé à la mise en scène de cette tragi-comédie. Cela a été trop vite pour que l’on ne puisse pas imaginer un « coup monté », qui paraît s’être déroulé comme un conte de fées. D’ailleurs toutes les informations qui ont circulé indiquent que cette bataille se prépare depuis plusieurs mois. Il fallait attendre le feu vert pour appuyer sur le bouton.
Il est venu dès qu’un « cessez-le-feu » a été signé au Liban. Le rideau s’est levé sur la scène, dès le lendemain de la signature de cet accord (pour employer un terme plus exact, un « mandat » américano-français) par HA au Liban. Après le génocide des Palestiniens, autorisé, encouragé et financé par le monde occidental, l’affaiblissement considérable de l’Axe de la Résistance et de l’Iran lui-même.
Peu importe comment la Syrie s’est renversée, ce sont les conséquences de cette action qui sont importantes. C’est un énorme pas en avant que la Pax Americana a franchi avec ce coup de force, un de plus dans l’avancée américaine, c’est-à-dire, la mise en place dans nos régions troubles de ce « Nouveau Moyen-Orient », dont ils rêvent depuis plusieurs décennies. Mais, c’est aussi un grand risque que prennent les Américains avec cette « victoire » facile.
Les acteurs sont nombreux avec des agendas non seulement différents, mais parfois contradictoires. La Turquie et Israël n’ont pas les mêmes objectifs. Les Kurdes et les Jihadistes encore moins. Les Jihadistes entre eux non plus. Certes, les ennemis des USA sont affaiblis, mais sont loin d’avoir disparu de la carte. Ni l’Iran, ni HA, ni la Russie, ni l’Axe de la Résistance n’ont disparu. La Chine est restée prudente durant toute cette période. Même les Alliés, comme l’Arabie Saoudite est restée silencieuse. Israël a son propre agenda (le Grand Israël, « du Nil à l’Euphrate ») qui ne correspond pas nécessairement à celui des américains à moyen ou long terme.
Les répercussions sur les pays voisins et lointains sont encore totalement inconnues et peuvent être aussi très grandes. Je résume très succinctement (une liste à la Prévert) les conséquences potentielles de ce changement de statut en Syrie :
1) En Syrie même. La transition risque de ne pas se passer aussi pacifiquement que cela en a l’air jusqu’à maintenant. Les divergences entre les factions jihadistes, les velléités d’autonomie des kurdes, les réminiscences de l’ancien régime, les occupations turque et israélienne sont tous des facteurs de déstabilisation potentielle ;
2) L’Irak craint que cette vague jihadiste ne se répercute chez eux. Les factions irakiennes de l’axe de la résistance craignent des frappes israéliennes, soutenues par des composantes locales anti-iraniennes. De même l’Irak pourrait craindre une résurgence de l’EI ;
3) HA craint lui aussi d’être combattu autant de l’intérieur, à travers les réfugiés syriens au Liban, ou par un renforcement de l’opposition politique libanaise ou par des bombardements israéliens qui occupent (de manière illégale) le Mont Hermon qui surplombe le Liban ;
4) Le Liban craint évidemment que si le scénario précédent a lieu, dans le but de porter le coup de « grâce » à HA, que cela ne provoque non seulement des soucis sécuritaires incontrôlables, mais un semblant de mini guerres civiles. Sans oublier que le jihadistes ont pris le contrôle (côté syrien, évidemment) de tous les postes frontières avec le pays, qui souffre déjà de problèmes politiques, économiques, financiers énormes. En plus les Israéliens qui occupent encore une partie du territoire libanais ne semblent pas vouloir quitter à la fin des 60 jours prévus depuis l’instauration du nouveau mandat ;
5) L’Iran craint encore une frappe israélienne potentielle sur son infrastructure nucléaire ou autre. De même des troubles intérieurs, avec un changement potentiel de régime ;
6) La Jordanie craint également autant la contagion du Jihadisme chez eux, que de l’annexion de la Cisjordanie par Netanyahou, dès la prise de pouvoir de Trump et le renvoi de milliers de Palestiniens vers la Jordanie ;
7) La Turquie, acteur essentiel et principal de ce renversement de régime, craint des conflits d’abord avec les Kurdes, ensuite des tensions avec Israël, qui, depuis le Mont Hermon, peut observer tout mouvement suspect au moins jusqu’au Sud de la Turquie, mais aussi avec l’OTAN et les USA ;
8) Israël même, qui a complètement détruit l’infrastructure militaire syrienne, et occupé de nouvelles terres en Syrie où il compte rester au moins jusqu’à fin 2025 peut s’attendre à un nouveau front (peut-être que même il le souhaite ?) ;
9) Les pays du Golfe qui voient d’un mauvais œil l’apparition de Frères Musulmans, leur bête noire, au pouvoir à Damas, avec le soutien de tout le monde occidental, USA en tête, leur principal allié. Comment feront-ils pour « financer » la reconstruction de la Syrie et que feront-ils des ex-Qaeda et ex-Daech libérés ?
10) La Russie craint d’être chassée de ses 2 bases militaires syriennes (Humaymim et Tartous). Elle vient d’annoncer que la GB et les USA viennent d’armer l’EI pour mener des opérations « terroristes » contre ces deux bases ;
11) L’Europe qui craint de voir revenir chez eux des prisonniers politiques (de nationalités européennes) qu’ils avaient qualifié de terroristes (anciens Al Qaeda, EI, Frères Musulmans, etc.). Si de nouveaux troubles importants venaient à s’installer de nouveau en Syrie, une nouvelle vague de réfugiés pourrait se rajouter aux précédentes et leur statut sera encore indécis, alors que l’Europe est en train justement de considérer ne plus vouloir accorder la protection aux anciens réfugiés vu leur reconnaissance du nouveau pouvoir ;
Ce ne sont que certains des problèmes potentiels, peut-être les principaux, qui semblent découler de la situation en Syrie. Il est cependant beaucoup trop tôt pour envisager quoi que ce soit comme analyse sérieuse de ce qui vient de se passer en Syrie et de ses conséquences ces dernières semaines. Je ne m’aventurerai donc pas sur ce terrain encore largement miné par des spéculations de tout genre. Il se pourrait aussi que tout se passe bien, comme cela a l’air de se passer jusqu’à maintenant, comme par magie.
Malek El-Khoury
Beyrouth / Genève le 29.12.24
NB: je signale que la présente analyse (comme toutes les précédentes ou les suivantes) ne concerne qu’un seul et unique aspect de la complexité de la politique moyen-orientale ou mondiale. Il ne faut donc pas la considérer comme complète et exhaustive. La situation est beaucoup plus nuancée que cela.
Je précise également que ceci est ma propre opinion dont j’assume seul la totale responsabilité.
Groenland
Pourquoi l'ambition de Trump pour le Groenland reflète la doctrine stratégique traditionnelle des États-Unis et la realpolitik de l'ArctiqueLe souhait du président Trump d’acquérir le Groenland n’est pas un caprice fou. Il s’agit en fait d’une extension d’une politique étrangère et de sécurité américaine fondamentale, la doctrine Monroe. Des intérêts économiques et géopolitiques sont également en jeu. Examinons les éléments.
La doctrine Monroe. Énoncée il y a deux siècles, bien avant que les États-Unis n’acquièrent le statut de grande puissance, la doctrine Monroe est fondamentale pour la conception américaine de sa place dans le monde. Elle décrète que les États-Unis ne permettront pas à des puissances étrangères d’entrer dans l’hémisphère occidental par la force militaire ou de chercher à y contrôler un territoire. En corollaire, les autres nations de l’hémisphère occidental sont obligées de reconnaître la primauté stratégique des États-Unis et de se soumettre à leur protection, ce qui n’est pas souvent dit à haute voix mais est clair pour tous les acteurs.
Au cours de leur évolution vers le statut de puissance mondiale, la domination par les États-Unis de leur propre région a toujours été considérée comme une condition préalable à leur position dans le monde. Protégés par deux grands océans, les États-Unis ne craignent pas d’être attaqués, sauf par des armes nucléaires, une éventualité que la dissuasion mutuelle a permis d’éviter. Sans être contestés par leurs voisins et à moins d’être entravés par d’autres puissances, les présidents américains se sont sentis libres de projeter leur puissance à travers le monde, comme ils l’ont fait à la fin du « moment unipolaire » et comme ils pourraient – ou non – chercher à le faire à l’avenir.
Ainsi, lorsque le président Trump associe son étreinte du Groenland à un langage sévère à l’égard du Canada, du Mexique et du Panama, il doit être pris au sérieux, voire au pied de la lettre. Le message est d’ordre géopolitique. Parce que vous partagez l’hémisphère avec nous, vous êtes obligés de nous écouter et de ne pas agir contre nos intérêts. Lorsque des questions stratégiques se posent – droits de base, voies maritimes, plateformes spatiales, sécurité énergétique – les États-Unis ont le dernier mot.
les États-Unis ont le dernier mot.
Importance stratégique du Groenland. À mesure que la calotte glaciaire de l’Arctique recule, le Groenland devient une source de plus en plus attrayante de richesses minérales, de terres rares et de pétrole. Des entreprises américaines cherchent déjà activement à obtenir des droits d’exploitation. Le Groenland accueille une importante base aérienne américaine. Sa position dans l’Atlantique Nord et dans l’Arctique convainc les décideurs politiques américains que les États-Unis doivent refuser le territoire du Groenland à d’autres. Trouver un moyen de rapprocher le Groenland des États-Unis et de le placer sous leur contrôle est un objectif économique et stratégique parfaitement raisonnable pour l’Amérique.
L’Arctique. Les nations possédant un territoire dans l’Arctique sont déjà en concurrence dans les domaines du transport, du commerce, des satellites de renseignement et de l’exploitation des ressources. La Russie détient la plus grande part du gâteau et a promis de partager le butin avec la Chine. Les intérêts américains et les revendications qui en découlent se limitent à l’Alaska. Si le Groenland pouvait être amené à la table des négociations en tant qu’atout des États-Unis lors du partage de l’Arctique, cela contribuerait grandement à corriger le déséquilibre.
Modalités. Comment les États-Unis peuvent-ils placer le Groenland sous leur contrôle ? Pas par l’invasion, espérons-le, mais par la persuasion, en proposant des résultats que ni les Danois ni les Groenlandais ne voudront refuser. Le parapluie nucléaire américain revêt une grande importance pour le Danemark. Même sans changer de souveraineté, on peut envisager un traité entre les États-Unis et le Danemark qui céderait la politique étrangère, les droits de base et l’exploitation des ressources contre un traitement favorable dans le contexte de l’OTAN. Quant aux Groenlandais, l’énorme avantage économique de l’ouverture du Groenland aux capitaux américains devrait suffire.
Ambassadeur Brunson McKinley, observateur politique expérimenté, 21 janvier 2025
Trump Foreign Policy in Four Circles
Four Geopolitical Circles: America's Blueprint for a New Global OrderTo understand what the new administration is up to geopolitically, it may be useful to view its objectives in
four circles – the Western Hemisphere, the Northern Chain, the Circle Around China, and the Circle of
Abraham. Objectives are not accomplishments and the President’s success in all four circles is far from
guaranteed, but this analysis may help the outsider to sort out moves that might otherwise appear
random or even chaotic.
The Western Hemisphere. The base of American power in the world is its hegemony over the Western
Hemisphere, where it cannot be attacked, save with nuclear weapons, and where it is and will remain
dominant. President Trump moved immediately to update the Monroe Doctrine by offering to buy
Greenland, by suggesting that Canada join the United States and by bringing back into line smaller
countries that showed signs of insubordination. The principal addressee of this message is nonetheless
China, now put on notice that commercial dealings in the hemisphere may be allowed, but close political
ties and any kind of security arrangement are verboten. The right to exploit the resources of the Arctic is
also a factor in the renewed emphasis on the hemisphere.
The Northern Chain. By reaching out to Russia and ending the Ukraine war, President Trump has in
mind the eventual creation of a temperate and arctic zone that will circle the globe and join together the
nations of North America, Europe and North Asia institutionally and commercially. These nations in fact
emerged from common civilizational origins – Greece, Rome, christianity, the renaissance and the
industrial revolution. Détente with Russia, the currently missing link in the Northern Chain, will permit
Europe to resume purchases of cheap energy and reopen a lucrative market for its industries. It will
facilitate the negotiation of agreements among all parties for the exploitation of arctic resources and
shipping routes. It will protect Russia from the stifling embrace of China and reinforce containment of
Chinese expansion. Finally it will allow the countries of the Northern Chain to work seriously on common
policies in energy, nuclear non-proliferation, terrorism and other portfolios where their interests converge.
The Circle Around China. The ability of the U.S. to slow or even reverse the expansion of Chinese
power will depend on the resistance applied to China by its neighbors. If Russia can be brought into the
circle of containment along with Japan, Korea, Taiwan, the Philippines, Vietnam, Australia, Thailand,
Indonesia and India, the circle will be complete. China will remain by far the strongest country in Asia, but
other Asian nations will have an alternative to falling completely under China’s sway by remaining in the
U.S.-led global economic system and continuing to do business with the Northern Chain. Beijing may
aspire to the same hegemony in East Asia that the U.S. enjoys in the Western hemisphere, but the
geopolitical realities are different and a policy of containment has a good chance of working.
The Circle of Abraham. President Trump has decided to restructure the Near and Middle East around a
strong Israel. He hopes to resettle the Palestinian refugees and bury the long-dead two-state solution.
Thereafter, in the framework of the Abrahan Accords, he will broker an alliance of the Sunni states –
Saudi Arabia, Turkey, Egypt, Syria, Jordan and the Gulf – against Iran, which in its isolation will be
compelled to conform or crack. The nations of the Northern Chain will come to support this policy, and so
no doubt will China. Certainly if Iran comes around, the end of the sanctions regime will allow China to
gain access to the Iranian petroleum that it will increasingly need. For the Sunni states of the region,
Israel can be a source of technology and financing, as well as a proven channel for influencing Western
policy.
The headlines come fast and furious every day. Now you know in which box to sort the clippings.
B. McKinley, Geneva, 20 February 2025